Selon ce cavalier, les chevaux ressentent tout avec une acuité exceptionnelle

Publié : 2 juillet 2025 à 6h00 - Modifié : 2 juillet 2025 à 15h30
Mandy Vereecken

Lorsqu’il s’élance pour de longues balades à travers les paysages de la campagne alsacienne, Éric Stahn accorde une attention toute particulière à sa tenue. De la tête aux pieds, il s’inspire fidèlement des cow-boys du Far West. “Ce manteau s’appelle un long-john”, précise-t-il en montrant un long manteau en cuir. “À cheval, la perception du temps change. On ralentit, on voyage différemment.” Et pour ces trajets au rythme du pas du cheval, s’équiper face aux caprices de la météo devient essentiel. “Le célèbre chapeau de cow-boy, par exemple, est conçu pour évacuer l’eau de pluie vers l’avant et l’arrière, sans gêner le cavalier.”


Cette fascination remonte à l’enfance. “Chez moi, on regardait beaucoup de westerns. Ensuite, nous, les gamins, on partait jouer aux cow-boys et aux Indiens.” Pour beaucoup de ses copains, ces jeux sont restés des souvenirs d’enfance. Mais pour Éric, ils ont tracé un chemin durable.


Au fil du temps, cette passion pour l’univers du western s’est transformée en un attachement profond aux chevaux. Son grand-père en possédait, et lui s’est toujours imaginé en avoir un jour. Aujourd’hui, il partage son quotidien avec trois compagnons à sabots : Nevada, Hutch et Kalhif. Lorsqu’il a construit sa maison, il y a vingt ans, il a même aménagé une fenêtre entre son salon et l’écurie. “Je vis avec eux, du matin jusqu’au soir.”


Éric ne s’est jamais intéressé aux compétitions ou aux spectacles équestres. Ce qui l’attire chez les chevaux, c’est tout autre chose. Il les considère non pas comme de simples animaux de travail, mais comme des êtres sensibles capables de nous enseigner beaucoup, si l’on sait les écouter. “Ils nous apaisent. Le stress s’envole avec le vent. Ils ressentent sans filtre, avec une intensité incroyable, bien au-delà de la nôtre.”


En 2016, un grave accident – sans lien avec ses chevaux – bouleverse sa vie. Une chute sur la tête. Il lui faudra trois ans pour retrouver l’usage de la parole et de la marche. Pendant cette longue convalescence, ses chevaux ont joué un rôle clé. “La vie est fragile. Aujourd’hui, pouvoir simplement monter à cheval est un cadeau. Plus besoin de râler, ni de courir. Il suffit d’avancer, à son rythme. Les chevaux me rappellent ça chaque jour.”


Depuis qu’il est à la retraite, il partage cette philosophie à travers des séances qu’il propose à ceux qui souhaitent découvrir ou réapprivoiser le contact avec les chevaux. Il affectionne particulièrement le travail avec les personnes qui en ont peur, ou qui ont vécu de mauvaises expériences. Ce jour-là, c’est Bernard Nuss qui tente l’aventure. “Je n’ai jamais été à l’aise avec les chevaux. J’en ai toujours eu un peu peur. Ce sont de puissants animaux, impressionnants. J’ai toujours gardé mes distances.”


Pendant ces séances qu’Éric appelle “cheval résonance”, il n’y a pas d’objectif de performance. Le simple fait que Bernard ait réussi à s’approcher du cheval est déjà une réussite. “Je ne pensais pas pouvoir établir un lien aussi vite. Par moments, le cheval me lançait un regard intense. J’ai reçu ces instants comme des cadeaux”, confie-t-il, visiblement ému après l’expérience.


À travers ces rencontres, Éric cherche à faire tomber les appréhensions en passant par l’émotion. Selon lui, il n’existe pas de raccourci : tout se joue dans le temps et la sincérité. “Chaque minute que les gens passent ici, en présence des chevaux, ils ne la passent pas ailleurs. Et rien que ça, c’est précieux.” Qu’on croie ou non aux énergies ou aux liens profonds entre humains et animaux, une chose semble évidente : être pleinement présent est déjà, en soi, une forme de guérison.