Plus de 10 000 foyers se retrouvent sans électricité ni téléphone en raison de la présence de nids de cigognes

Publié : 5 juin 2025 à 6h00 - Modifié : 5 juin 2025 à 14h16
Mandy Vereecken

Cigognes

Le mardi 3 juin à 7h50, plusieurs communes du Haut-Sundgau ont été brutalement plongées dans le noir. Environ 11 600 foyers se sont réveillés sans électricité ni réseau téléphonique.
« On était complètement coupés du monde, on ne comprenait pas ce qui se passait. Même à la mairie, on ne pouvait joindre personne », raconte François Cohendet, maire de Ferrette.

Selon Enedis, cette panne majeure aurait été provoquée par des éléments de nids de cigognes. Ces constructions impressionnantes, composées de grosses branches pouvant atteindre un poids de 500 kilos, auraient provoqué des courts-circuits sur le réseau. Trois lignes électriques ont ainsi dû être désactivées dans le secteur.

Ce type d’incident n’est pas inédit. Des cas similaires avaient été recensés à Metz en début d’année 2024, nécessitant l’intervention des équipes techniques. Face à cette problématique récurrente, les fournisseurs d’électricité collaborent étroitement avec les associations de protection de la faune, comme la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO).

« La cigogne est une espèce protégée. On ne peut pas retirer ou déplacer un nid à la légère », souligne Cathy Zell, chargée de mission à la LPO Alsace. « Ces nids sont le fruit d’un travail colossal, et toute intervention nécessite une autorisation spécifique. »

Durant l’hiver, les nids sont souvent inoccupés, ce qui permet des actions de déplacement plus simples. Toutefois, la réglementation impose de fournir aux cigognes une nouvelle plateforme pour assurer leur reproduction. Une autorisation de la DREAL est alors nécessaire avant toute opération.

Les difficultés s’intensifient au printemps, période où les nids abritent souvent des œufs ou des oisillons. D’avril à septembre, toute intervention est soumise à des critères stricts : risque avéré de court-circuit ou menace directe sur les installations. Dans ces cas-là, Enedis fait appel à la LPO pour coordonner une action respectueuse du vivant.

Avec le réchauffement climatique, la période de nidification s’est allongée. Les cigognes reviennent plus tôt, repartent plus tard, et parfois ne migrent plus du tout. « Cela complique notre organisation. On multiplie les réunions de coordination avec la LPO pour s’adapter à ces nouvelles habitudes », confie une responsable d’Enedis.

Malgré les efforts des collectivités et des énergéticiens, certains incidents tragiques surviennent encore. Des oiseaux entrent parfois en contact avec des lignes à haute tension, provoquant leur électrocution.
« De nombreuses mesures ont été prises pour sécuriser les pylônes, notamment avec des dispositifs anticollisions, mais le risque zéro n’existe pas », précise Cathy Zell.

En 2024, Enedis a consacré 100 000 euros à la protection des cigognes en Alsace et Franche-Comté, un budget qui n’existait pas auparavant. Une preuve de l’attention croissante portée à la cohabitation entre biodiversité et infrastructures humaines.